Barbès Blues au temps du couvre-feu / épisode précédent
– Oh, pardonne-moi, si je suis allé vite en besogne avec ta Zohra les « Louis d’or », mais, dans un cas comme dans l’autre, cela ne sera pas une bonne affaire, si j’ose dire. J’ai beau me dire « A la grâce de Dieu, sois miséricordieux, oublie ce qui est éphémère ici-bas, surtout le mal qu’on t’a fait, rappelle-toi que les insultes ne sont que des mots, et les crachats de l’eau », rien à faire, impossible de solder le compte ! La suspicion me galope dans les sangs, j’ai le palpitant qui moud du ressentiment et je me ronge le foie à en vomir. Comment oublier la trahison, toutes ces années de travail et de privation, la perte de ma bien-aimée ? Et même si j’avais oublié et fait mine d’accepter la politique que ceux de ma maison m’ont concoctée dans le dos, à quoi m’aurait servi tout le bien qu’ils auraient pu me faire ensuite ?! Pour le moment, ce n’est pas d’une femme dont j’ai besoin, mais de chansons ! Comme tu viens de le dire en me proposant de taper la goualante plutôt que la gueulante. Et si, en plus, ça peut t’aider à tenir la route et fleurir à bon port, pourquoi se priver ?! ». Madjid tira plusieurs bouffées sur sa pipe de kif. A l’expiration, deux longues colonnes de fumée lui sortirent des narines et se rejoignirent au-dessus de sa tête en un nuage qui fut rapidement dispersé. Lire la suite