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Archives en mouvement : Hommage à Djamel Kelfaoui

27 Mai

En hommage à Djamel Kelfaoui, décédé il y a 10 ans le 22 mai 2009 à Laghouat ( Algérie), Quartiers Libres partage ce texte écrit par M. Farid Taalba, quarante jours après son décès.

Photo prise lors du 2nd FSQP – 3-4-5 oct.2008 à Nanterre – projection du film de Djamel Kelfaoui « Cheb Hasni, je vis encore ! » – le dim. 5 oct.2008

Une des dernières fois où nous avions vu Djamel Kelfaoui, c’était le 14 mars 2009. Il avait accueilli une séance du Cinéma de Quartiers consacrée à la Palestine dans ses locaux de Tam-Tam à Pantin. Evidemment nous avions eu de nombreuses discussions et il ne manqua pas de nous faire état de l’avancement de ces différents projets cinématographiques.

Il était notamment sur le point de partir en Algérie pour terminer son film sur Cheb Hasni.

A travers son désir de faire connaître les musiques populaires algériennes, c’est son attachement à l’Algérie et à la mémoire de l’immigration qu’il affirmait une fois de plus comme il avait eu souvent l’occasion de le faire : « Moi, je suis Algérien et je ne peux pas faire abstraction de l’histoire de mon pays et de la lutte de mon père par rapport à ce pays (…). Ma mère me déposait chez une voisine les jours où ils allaient manifester pour que nos pères soient libérés à l’époque des rafles. Je n’ai pas de souvenirs directs des événements mais je me souviens très bien de ma mère m’en parlant. J’ai donc très vite baigné dans cette ambiance et c’est grâce à elle que je me suis politisé. »

Et si ce fut grâce à sa mère qu’il se politisa, ce fut aussi grâce à elle qu’il put envisager de retourner au pays en devenant sa productrice. Ce soir là, il nous le rappela avec dans les yeux une flamme de reconnaissance infinie, heureux de contourner les obstacles d’un milieu professionnel dont il ne cessait de dénoncer les hypocrisies, les coups bas et les avidités exacerbées. Gorgé de joie créatrice, il s’envola quelques jours après pour l’Algérie. Deux mois plus tard, je me rendis aussi au bled pour réaliser des entretiens avec des gens de mon village comme je le lui avait dit avant son départ.. Lire la suite

Black Mirror Selekta #16 : Tribute To Gil Scott Heron 2 & 3

14 Mai

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Hommage par les samples à Gil Scott Heron, grand poète torturé, musicien de génie et activiste de la cause noire mort en 2011 peu après avoir sorti son premier disque depuis 16 piges, le splendide « I’m New Here » qui le rappela à la mémoire de tous les amoureux de musique qui saigne. Régalez-vous des deux selektas qui suivent, toujours par Black Mirror, émission hip-hop, de la radio ariégoise La Locale.

 

 

L’œuvre de Gil Scott Heron, immense, fut remise en lumière par le crépusculaire « I’m New Here » sorti en 2010 juste avant sa mort, après 15 ans de silence. Nombreux sont les rappeurs et producteurs qui ont salué l’homme et le musicien quand il s’est éteint, et ont redit tout ce qu’ils lui devaient. Des boucles idéales, quelques mots glissés en intro d’un morceau ou en conclusion d’un album, une attitude de défi désinvolte face au pouvoir sous toutes ses formes. Mais surtout, au delà même de la forme et de sa scansion proto-rap – qu’il n’était déjà pas le seul à pratiquer quand il commença, les Last Poets et les Watts Prophets entre autres réinvoquaient eux aussi l’art des griots dans le ghetto –, c’est sa démarche d’alchimiste qui préfigurait l’ouragan rap qui allait tout emporter au cours des décennies suivantes : faire de l’Art avec la rue, de l’or avec la merde, de l’exceptionnel avec le médiocre, de l’éternel avec le quotidien. Il changeait le slang en littérature. C’est en cela qu’il était bien un « bluesician », tel qu’il se désignait lui-même, qu’il renouait avec cette tradition du musicien qui n’est qu’un parmi les autres, qui n’est que la voix d’un peuple réduit au silence. Plus qu’un pionnier, c’était donc un trait d’union, un pont entre le blues vagabond du sud de son enfance et le hip-hop à naître dans les rues de son Bronx d’adoption.  [ La suite sous la deuxième selekta ]

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Black Mirror Selekta #15 : Tribute To Gil Scott Heron 1

30 Avr

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Hommage par les samples à Gil Scott Heron, grand poète torturé, musicien de génie et activiste de la cause noire mort en 2011 peu après avoir sorti son premier disque depuis 16 piges, le splendide « I’m New Here » qui le rappela à la mémoire de tous les amoureux de musique qui saigne. Toujours par Black Mirror, émission hip-hop, émission de la radio ariégoise La Locale.

 

Misère de la conception de l’Art dans la tradition occidentale, les musicologues et autres journaleux ont toujours besoin de désigner des originators, des pionniers géniaux qui auraient inventé à eux seuls un style musical, auraient infléchi de leur seule voix le cours de l’histoire. Alors on a beaucoup dit de Gil Scott Heron qu’il était le « parrain du rap », le premier à poser ses poèmes de rue en rythme sur des boucles soul/jazz, entraînant à sa suite tout le mouvement hip-hop. Lui-même ne goûtait pas ce titre honorifique bien trop lourd à ses épaules frêles. Il préférait se dire « bluesician », superbe définition de sa vision si particulière de la musique qu’il nommait avec le flûtiste et claviste Brian Jackson, son acolyte des débuts, de la « bluesology ».

Gil Scott venait du Sud. Il avait poussé dans le Tennessee, chez sa grand-mère Lilie Scott, abandonné par son daron (pour la petite histoire, un footballeur jamaïcain, premier Noir à jouer chez les Celtics de Glasgow) et laissé là par sa daronne partie enseigner l’anglais à Porto Rico. Mais à l’âge de douze ans, il retrouve Lilie morte et part s’installer avec sa mère dans le Bronx. Brillant élève et déjà passionné d’écriture, il parvient à entrer dans une école blanche réputée puis comme boursier à l’Université. C’est là qu’il prend une année sabbatique pour boucler son premier roman, superbe chronique des trottoirs sales, « Le Vautour », écrit à 18 piges. Il rencontre un petit succès et, avec l’avance de 5000 dollars qu’il a reçu de l’éditeur, il se réinscrit à la fac comme un joli doigt d’honneur à l’institution blanche.

Décidément salement précoce, il écrit au même moment le morceau le plus retentissant de sa longue carrière, le monumental et ricanant « The Revolutioon Will Not Be Televised », premier d’une longue série de brûlots qui s’attaquent autant au pouvoir qu’aux errements de ses frères. Il est très vite repéré par le boss du label Flying Butchman – producteur de John Coltrane entre autres – qui lui offre un incroyable orchestre pour son premier disque studio, l’éternel « Pieces Of A Man » : Ron Carter, Hubert Laws et Bernard Purdie. Il compose le tout, et la plupart des grands disques suivants, avec son pote flûtiste Brian Jackson, cherchant à faire sonner ses poèmes comme de véritables chansons, à faire de ses mots écorchés de la musique. Sa voix, qu’il décrit lui-même comme le grondement d’une rame de métro aux roues crevées, est à la fois profonde et vulnérable, puissante et blessée, et s’embellira sa vie durant de toutes les laideurs qu’il traverse, entre deuils, addictions multiples et passages en prison.
Gil Scott Heron se faisait beaucoup de mal mais nous aura fait beaucoup de bien. Après un long silence de près de 15 piges habité de fantômes et de fumées d’amnésie, il sortit le splendide et élégiaque « I’m New Here » en 2010, rappelant à tous à quel point ses mots et ses notes transperçaient les coeurs et les tripes. Ils n’étaient jamais aussi bouleversants qu’à peine rehaussés de légers tapis de cordes ou de sèches rythmiques, approchant même le divin quand sa voix se brisait sur la mélodie et dévoilait la fragilité qui l’emporta, seul, dans un hôpital pour indigent du New York qui « le tuait » depuis toujours.

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L’Archive en Mouvement: le procès Hiblot

16 Mar

Reportage FPP – Procès Hiblot meurtrier de Youssef Khaïf –  Septembre 2001.

Le 17 mars 2018, une Marche des Solidarités va avoir lieu. A l’occasion de cet événement, on se propose d’apporter une contribution qui consiste à mettre à disposition du public un document sonore d’une émission de FPP (Radio Fréquence Paris Plurielle) pour laquelle j’avais enregistré des interviews. Elle rend compte du déroulement du procès du policier Pasacl Hiblot, meurtrier de Youssef Khaïf et que Mogniss H. Abdallah résumait ainsi : « Le 28 septembre 2001, la Cour d’Assises de Versailles a acquitté le policier Pascal Hiblot qui, dix ans auparavant, avait tué Youssef Khaïf, 23 ans, d’une balle dans la nuque, alors que ce dernier s’éloignait à bord d’une voiture volée. Prononcé dans un contexte surdéterminé par la nouvelle hantise de l’ « hyperterrorisme islamiste » et par une surenchère sécuritaire pré-électorale, ce verdict a cependant suscité une vague d’indignation au-delà des milieux déjà mobilisés contre l’impunité policière, notamment sous l’égide du MIB, le Mouvement de l’Immigration et des Banlieues1. ». Lire la suite