Barbès Blues au temps du couvre-feu / épisode précédent
Francis s’apprêta ainsi à prendre congé de ses amis quand Bou Taxi se leva séance tenante : « Monsieur Francis, je viens avec vous… ne faites pas cette tête-là, n’allez pas me faire la morale, ni vous autres… je ne suis pas fou… il y va de l’honneur de mon taxi… s’il y a un barrage, monsieur Francis, vous pourrez toujours dire que je suis votre manœuvre à tout faire, votre « bon’z’ami »… du grenier au garage… du garage à la voiture ! Vous direz que je suis votre chauffeur. Les militaires et monsieur le maire n’y verront que du feu, vous pourrez même me maltraiter devant eux pour que cela fasse plus vrai que nature ! Une chose est sûre, si vous ne voulez pas, j’irai alors de mon côté ! Mais il ne sera pas dit que Bou Taxi aura abandonné ses passagers en plein danger. ».
Les uns et les autres étaient restés estomaqués avec un bœuf sur la langue et personne n’osa la démuseler devant tout le zèle dont venait de faire preuve Bou Taxi qu’ils connaissaient d’ordinaire plus froussard ; seul le maître, à qui tous ses interlocuteurs s’en étaient remis par leur silence, récita d’une voix aussi claire que calme une formule lapidaire : « Oh croyants, remplissez fidèlement vos engagements ! ». Francis se renfrogna, hésitant : « Remplissez, remplissez, il ne suffit pas de le dire ! ». Puis il cueillit tous les regards qui avaient lancé sur lui tous leurs bouquets pour qu’il se mette au parfum de Bou Taxi. Devant toute leur insistance, il finit par mettre ses réticences en terre : « Bon, ok, tu viens ! Mais tu ne pourras pas dire que je ne t’avais par prévenu. – Pas de problème, mon z’ami ! Il n’y a pas de mots pour dire combien vous êtes… je ne sais comment dire ! – Te moque pas de moi… moi, tout ce que je sais, c’est qu’on prend une route que tous les mots du monde ne peuvent pas décrire à l’avance… Bon, c’est bien joli toute cette philosophie mais, yallah, vaut mieux pas stationner plus longtemps dans l’introduction ! – Vous pouvez le dire, monsieur Francis, rajouta respectueusement Bou Taxi, il n’y a pas de mot pour ça. Lire la suite