Laurete Da Fonsceca

25 Avr

Une exilée politique portugaise

 

Née en 1936, Laurete Da Fonsceca est une figure parmi d’innombrables des émigrés portugais qui ont quitté leur pays pour fuir la dictature qui y sévit de 1926 à 1974. Nombre d’entre eux immigrèrent en France. Avec ses enfants, elle fuit la dictature salazariste qui menaçait notamment son mari pour s’installer en France à Massy, un des lieux de regroupements des communautés portugaises en région francilienne.

En effet, depuis 1926, le Portugal subit une dictature qui ne sera renversée qu’au printemps 1974, lors de ce que l’on a appelé la Révolution des œillets. Cette révolution est aussi appelée la révolution du 25 avril 1974, il y a 40 ans.

 

 

La révolution des œillets

 

Cette révolution est une des rares révolutions modernes européennes où l’action des militaires a débouché sur un processus démocratique populaire et sur un processus de décolonisation.

Depuis les années 1950, les colonies portugaises sur le continent africain (Mozambique, Angola, Cap-Vert, Guinée-Bissau) se soulèvent et engagent des luttes pour leur indépendance. Les gouvernements autoritaires d’Antonio de Oliveira Salazar puis de Marcelo Caetano refusent de reconnaître les droits de ses populations et envoient l’armée pour maintenir leur domination. Mais face aux résistances des populations indigènes, les responsables de l’armée coloniale, en grande partie composée d’appelés du contingent, prennent conscience de la politique suicidaire de leurs gouvernants et décident de renverser le régime.

Le 25 avril, un groupe d’officiers met en action un plan de prise de contrôle des points névralgiques du pouvoir et en moins de deux jours le régime dictatorial est renversé. Les militaires définissent ainsi leur programme politique : « Démocratisation, décolonisation, développement ». Les médias désormais ne sont plus censurés, les prisonniers politiques sont libérés et le retour des exilés possibles.

 

Une militante de quartier à Massy

 

Mais Laurete Da Fonsceca n’est pas retournée vivre au Portugal. Elle est restée vivre dans le quartier où elle avait lutté. Son mari, enseignant devient maçon et Laurete vient en aide aux familles immigrées portugaises qui habitent alors les bidonvilles de Massy. En 1971 le gouvernement décide la destruction, parfois brutale et sans aménagement, de tous les bidonvilles du territoire. Laurete Da Fonsceca devient alors la principale actrice du mouvement de protestation contre les bulldozers mais surtout contre la dispersion des populations loin de leurs lieux de travail. Grâce à cette lutte sociale, les habitants obtiennent gain de cause et la possibilité d’être relogés à Massy dans des conditions décentes.

 

laurete da fonseca expulsion

 

Mais elle fut victime du succès de la lutte qu’elle a aidé à porter, et est rapidement menacée et convoquée devant une commission spéciale d’expulsion. Un comité de soutien se met alors en place recueillant de nombreux témoignages sur son action sociale. Divers journaux relaient ce soutien et 1500 personnes défilent dans les rues de Massy. L’arrêt d’expulsion est finalement suspendu, mais Laurete Da Fonsceca reste sous cette menace durant sept années encore, jusqu’en septembre 1981, et elle n’obtiendra jamais la nationalité française.

 

Laurete Da Fonsceca est toujours restée là, dans son quartier, à Massy, où elle a vécu, lutté, et où elle est enterrée depuis 2001. Massy honore enfin sa mémoire : la mémoire d’une femme qui a refusé la dictature, qui a lutté pour les droits des autres, pour la dignité des habitants de son quartier.

Une Réponse to “Laurete Da Fonsceca”

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  1. Priez pour nous, pauvres chômeurs | Quartiers libres - 2 octobre 2015

    […] n’ont d’autre choix que de construire et de vivre dans des bidonvilles, comme hier les Portugais dans le bidonville de Champigny et les Algériens dans celui de Nanterre. De fil en aiguille, ces bidonvilles deviennent le dernier […]

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