Deux nouvelles sans aucun rapport ont meublé les colonnes de la presse ces derniers jours.
La première est que le virus Ebola se diffuse plus largement qu’auparavant sur le continent africain. La seconde est que l’Institut Pasteur a égaré des échantillons du virus du SRAS.
Comme c’est l’été, on a de quoi faire un bon blockbuster.
Avant que des dentistes fantasques ou leur mentor qui comprend l’empire ne fasse une fiction à succès, on va tenter de voir quel est point commun entre ces deux événements.
Commençons avec la propagation du virus Ebola. Cette maladie est une fièvre hémorragique très contagieuse, elle se transmet à l’homme depuis la chauve-souris.
a) chauve-souris + fièvre hémorragique : on a le blockbuster. Les vampires existent. Reste à déterminer à quel groupe humain ils appartiennent.
b) c’est le coup d’une agence d’un gouvernement ou d’une multinationale pour liquider une partie de la population et piller des ressources. Reste à déterminer qui contrôle ces multinationales ou officines gouvernementale. Choix compatible avec le scenario (a) : les vampires contrôlent le monde, c’est bien connu.
c) La diffusion de cette maladie tient du fait que les virus mutent pour survivre et que, moins foudroyant, il peut se diffuser plus largement. Par ailleurs, la déforestation imposée par l’exploitation des ressources naturelles ainsi que les conflits met en contact les humains avec les points de contamination dans des zones rarement atteintes. C’est ainsi que les personnes contaminées sont plus nombreuses et elles peuvent transmettre la maladie à des gens plus rapidement : l’avancée sur la forêt facilite les moyens de communications. La déforestation, les conflits générés par le pillage de ressources naturelles ont des responsables que l’on peut trouver : entreprises et États. Les noms des décideurs sont connus.
Le troisième scenario s’appuie sur des constats réels et une approche scientifique, économique et sociale de la situation. Elle permet aussi de comprendre comment les activités humaines ont un impact sur l’environnement. Si cet impact est néfaste, il est possible de trouver des moyens d’action en direction des organismes publics et privés qui les mettent en œuvre. C’est possible, mais c’est moins extraordinaire que d’imaginer des monstres ou des agents des services secrets dans un pays lointain. C’est aussi plus responsabilisant, le train de vie des gens qui habitent en France repose en grande partie sur le pillage du continent africain.
Passons aux échantillons du SRAS de l’Institut Pasteur qui se sont envolés dans la nature. Le SRAS c’est un coronavirus de la famille de la « grippe avaire ».
a) Un groupe terroriste s’est emparé des flacons et va s’en servir pour commettre des attentats ou menacer la sécurité du monde libre. Il suffit de coller une étiquette qui donne un label d’authenticité au groupe terroriste (IRA, anciens du KGB, Al Qaida, etc).
b) C’est un coup monté par un gouvernement ou une multinationale afin de faire diminuer le nombre d’humain sur terre et de contrôler le monde grâce au seul remède à la maladie qui est en leur possession. Cette option est cumulable avec la première : le groupe terroriste est manipulé par un gouvernement ou une entreprise.
c) Depuis plusieurs dizaines d’années afin de faire des économies dans le budget de l’Etat, les services publics externalisent les services afin de faire chuter le nombre de fonctionnaires. La logistique fait partie des secteurs concernés. Les boites de logistiques utilisent des travailleurs précaires et les payent mal. Le boulot est fait à l’arrache, sans suivi. C’est ainsi qu’un frigo contenant la souche du virus SRAS disparait : embarqué par erreur par un intérimaire (peut-être même Sans-papiers), la boite qui l’emploie camoufle la faute et le service public concerné par la disparition sort le parapluie administratif. Une souche de virus tueur dans la nature, la faute aux coupes budgétaires.
Le troisième scénario n’est pas folichon niveau suspense. C’est le traintrain quotidien qui explique pourquoi les hôpitaux fonctionnent moins bien qu’avant ou que les transports en communs partent en vrilles. C’est ce qu’on subit tous les jours en se disant qu’on paye trop d’impôts en France et que les patrons vont tous partir à l’étranger avec les emplois sous le bras tellement il n’y a pas de culture de la compétitivité dans ce pays. Bref, on est un peu tous complices de cette potentielle catastrophe du SRAS dans la nature, et les grands organisateurs de ces économies sur notre vie vont du PS au FN. Pas difficile de trouver des noms de responsables, le seul suspense tient à comment on attribue les marchés public.
Comme les deux scénarios « c » sont une base de documentaire sur la vie quotidienne low cost, ils ne font pas rêver. Il faut aussi prendre en considération que regarder les choses sous cet aspect incite à lutter et devenir responsable.
Pour beaucoup de personnes, changer les choses n’est plus possible. Quand on n’a pas envie de réussir, on se cherche des excuses. C’est ainsi que les scénarios « a » et « b » deviennent des schémas de pensée dominants. Il y a toujours un « vilain » responsable du malheur des autres parce que différent et méchant, et tout est ficelé en haut lieu par des gens qui contrôlent tout.
Le « virus » du complot qui touche notre société actuellement est juste le symptôme d’une résignation non assumée.
8 Réponses to “Le virus du complot”