Puisque pour les nationalistes il est à la mode d’utiliser le répertoire d’Annie Cordy pour diffuser le fond de leur pensée, leur rendre la pareille est de bon aloi.
Depuis un an, Farida Belghoul travaille en commun avec Alain Soral. Voici donc une année qu’elle loue son image et son passé militant pour donner une caution authentique à « Egalité et réconciliation ».
Tout a commencé par des conférences, et une tentative de captation d’héritage de la Marche pour l’Egalité, à laquelle elle n’a pas participé. En effet, Farida Belghoul a raccroché les wagons un an plus tard, lors de Convergence 84.
Malgré l’évènement que représente la Marche, il n’y a pas eu assez de buzz pour en faire un créneau commercial durable : c’est en grande partie pour cela que Soral et Belghoul ont recentré leurs affaires sur celui de l’école.
Après quelques conférences avec Marion Sigaut prônant que la Révolution française est la fin du paradis sur terre (« on était si bien du temps du Bon Roi Louis et quelques »), Farida Belghoul a décidé de mêler les attaques des nostalgiques de l’ancien régime avec son aversion envers l’Éducation Nationale.
A longueur de vidéo, elle rabâche donc que l’école est satanique, qu’elle crée des idiots sciemment et n’a pour objectif que de pervertir les enfants des classes populaires, surtout s’ils sont immigrés.
Et effectivement, contrairement eux enfants des familles bourgeoises ou aristocrates qui ont de quoi assurer, les mômes des quartiers ne peuvent aller apprendre le latin dans des écoles privées.
Les établissements privés sont le domaine des catholiques. Ils ne sont pas les seuls à militer pour l’enseignement privé, mais ils représentent la communauté qui contrôle le plus d’établissements parce qu’ils sont l’émanation radicale du groupe social le plus riche. Depuis près deux ans, les catholiques intégristes, notamment Civitas, le mouvement d’Escada, tentent en vain de mobiliser autour d’eux pour s’attaquer à l’école publique, attaques accentuées depuis la mise en place du gouvernement Hollande.
Leur rengaine est celle des 200 dernières années : l’école publique est celle de la « République », une émanation diabolique qui a tué le Bon Roi, représentant de Dieu sur terre. L’école publique est le fruit du complot ourdi par les juifs et les francs-maçons pour mettre la France, fille aînée de l’Eglise, à terre en la pervertissant.
Ce discours ne connaît guère de succès, en dehors de petits cercles fermés, car les gens qui le véhiculent sont des caricatures et utilisent des arguments rationnels irrecevables.
La convergence d’intérêts et de point de vue entre les catholiques durs et Farida Belghoul ont permis à cette dernière de s’emparer de leur discours et de le rendre audible auprès des classes populaires issues de l’immigration, et particulièrement auprès des musulman.e.s.
La situation pourrie et le désarroi ont été un terreau sur lequel son message de panique est passé, la logistique des catholiques et de Soral faisant le reste.
On assiste alors à un fabuleux retournement de situation : les musulman.e.s, qui sont des ennemis objectifs et subjectifs des catholiques, deviennent les fantassins d’un combat idéologique qui n’est pas le leur.
Alors que ni Soral, ni Farida Belghoul, ne se sont mobilisés contre l’Islamophobie auprès des militants de quartiers et qu’ils ont régulièrement critiqué les organisations qui luttaient contre les discriminations tel le CCIF (accusé d’être l’instrument de Soros), ils deviennent brutalement les défenseurs de la foi et de la morale aux yeux d’une partie de la communauté musulmane.
D’une manière vicieuse, ils annulent une lutte pour l’égalité des droits menée par des associations telles que « Mamans Toutes Egales » pour le transformer en un ralliement au combat de restauration des valeurs catholiques. D’un combat émancipateur, on passe à une subordination inconsciente et totale.
Il est clair que les pouvoirs publics ne sont pas exempts de reproches. Rien n’est clair dans les messages qui passent auprès des populations. Au mieux on y verra un mépris conscient (« ils se foutent de nous ») de la part des dirigeants, au pire un oubli total de ce que sont les classes populaires pour les élus qui sont censés les représenter (« ils s’en foutent de nous »).
La rumeur selon laquelle l’école deviendrait un lieu où l’on maltraite sexuellement les enfants devient une option crédible. L’école fait partie d’une société dans laquelle nos enfants sont exposés à des images et des représentations violentes et cruelles du corps. Du journal de 20 heures aux affiches publicitaires en passant par Internet (que les enfants maîtrisent souvent mieux les adultes), le déferlement de ces images est constant.
Si l’ensemble de la société est touchée par ce phénomène, alors pourquoi pas l’école ? Surtout si on considère que ce n’est plus un lieu où les enfants peuvent apprendre quelque chose.
Dans ce contexte, difficile de relativiser ou de faire prendre conscience que si la rumeur vient du Net elle n’est pas plus vrai que ce que les médias traditionnels racontent.
Et ceux qui tentent de savoir qui propage cette rumeur et sur quoi elle se base sont assimilés à des gens qui ne protègent pas leur enfants.
On divise les quartiers, on rajoute des tensions dans l’école.
Ces divisions font mal, parce qu’elles font le bonheur de ceux qui veulent notre oblitération en mettant en place un piège.
Celui-ci est simple : si l’école publique est un lieu où l’immoralité règne, alors mieux vaut l’école privée catholique.
Retour en arrière, chez les pères blancs et payants, en prime. Une scolarité entière dans une école formate l’esprit, de la maternelle au baccalauréat, on rend l’assimilation possible.
Autre possibilité : le repli à la maison, comme le prône Farida Belghoul, et donc le repli sur soi.
Troisième option, la création d’écoles privées musulmanes avec des fonds français ou venant de pays étrangers.
Dans tous les cas, l’Ecole publique et gratuite est remise en cause.
On met les personnes qui ont besoin d’un service public dans la position d’être celles qui veulent le détruire, au nom de valeurs religieuses ou communautaires. C’est le fantasme d’Alain de Benoist, repris par Alain Soral, Riposte Laïque et Serge Ayoub, qui consiste à dire que l’immigration ne sert qu’à détruire les acquis sociaux des classes populaires.
Voilà le champ des possibles que proposent Soral, Belghoul et les droites radicales aux habitants des quartiers.
Bien que Farida Belghoul et Soral prétendent lutter pour « l’égalité et la réconciliation » entre la France blanche et catholique et les populations des quartiers populaires, leur action concrète a pour effet de tenter la destruction des services publics, déjà dans la mire du gouvernement. Cette attaque met en position de faiblesse les populations les plus faibles économiquement. Les gesticulations actuelles du PS sur des programmes incompréhensibles pour expliquer que les filles peuvent jouer au foot ou les garçons faire la vaisselle servent avant tout à faire oublier les renoncements du gouvernement en matière de justice sociale et d’égalité.
La colère et le manque de confiance envers une classe dirigeante aveugle devant les injustices sociale fait basculer les quartiers dans un conflit qui n’est pas le leur.
La finalité de la logique politique proposée par Soral se concrétise par une soumission de toutes les minorités à la majorité sociale et économique française : blanche, masculine et catholique.
En cas de refus, la perspective est la division des communautés et la stigmatisation de la partie la plus attachée à la religion ou à des valeurs non franchouillardes, en mettant en place le conflit de civilisation sous couvert d’un refus d’assimilation. La mise en place d’un apartheid dont Alain de Benoist , Bernard Lugan et Soral sont des défenseurs.
Soumission/assimilation ou apartheid, voilà ce que propose une Farida (Georgette?) éduquée et élitiste qui a plus de point et d’intérêts communs avec celles et ceux qui disent la messe en latin que les habitants des quartiers dont elle utilise la colère pour rendre service à ses bailleurs de fonds.
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