A problème réel, une solution concrète : l’exemple de la Grèce

10 Juil

Les Grecs viennent d’exprimer leur ras-le-bol de la politique d’austérité imposée par la Communauté européenne.
Cette politique a fait des dégâts considérables dans la société grecque. Des années de calvaire et de saccage social pour un peuple que les médias dominants nous présentent volontiers comme des fainéants et des incompétents. Ce portrait à charge des grecs est destiné à nous faire oublier qu’en 2004, Athènes accueillait les Jeux Olympiques. La Grèce était alors présentée comme une des belles réussites de la construction libérale européenne. En moins de 10 ans, la bascule du paradis à l’enfer libéral est rapide et sans passage par le purgatoire. C’est une réalité à retenir pour tous ceux qui s’imaginent l’abri.

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En Grèce, les politiques libérales ont semé un sacré chaos et un futur incertain. La Grèce est aujourd’hui un pays ruiné au cœur de l’Europe : une sorte de tiers monde intra-muros de l’espace Schengen avec soupes populaires et tensions sociales voire raciales. Dans ce jeu de massacre, pas étonnant, en effet, de retrouver en première ligne les immigrés qu’une partie des politiciens a tenté de rendre responsables de la crise pour préserver l’ordre social. Avec le soutien du grand patronat et la complaisance des forces de police, les nationalistes grecs d’Aube dorée et cie ont pu ainsi s’en donner à cœur joie, en exprimant leur phobie raciale.

La chasse aux immigrés n’étant évidemment pas le seul rôle dévolu aux nationalistes en tant de crise, ils ont aussi réprimé durant ces dernières années, aux côtés de la police, tous les espaces de contestations sociales qui organisaient une résistance aux ravages du libéralisme :

Dans le contexte de cette décennie de lutte que connaît le peuple grec, les rôles de chacun sont sortis des carcans folkloriques dans lesquels se plaisent à les enfermer les mythomanes de tout bord. En Grèce, la police et les fameux « corps constitués », véritables fétiches des Soraliens, maintiennent sans surprise un ordre social injuste et violent.

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L’extrême droite nationaliste critique et aboie sur la construction européenne mais participe sur le terrain à la répression de toute les formes de contestation du libéralisme, en coordination avec les forces de l’ordre. Elle participe aussi directement à des gouvernements qui se soumettent au diktat de la troïka, comme ce fut le cas avec le Laos qui fut le premier parti d’extrême droite – avant Aube dorée – à percer lors d’élections en Grèce depuis la chute de la dictature militaire d’extrême droite.
Le Laos s’est façonné une posture de rebelle à coups de slogans xénophobes et antisémites et de théories complotistes portées par son leader Georges Karatzaferis. Il avait, entre autre, réclamé en 2001 un examen du rôle du Mossad dans les attentats du 11 septembre aux États-Unis. Tout ce cirque, qui rappelle celui de la dissidence en France, pour finir ministre dans un gouvernement soumis à la troïka en 2011. Une sorte de Chauprade avant l’heure.

Grande gueule mais petit bras, c’est le symbole des droites radicales partout en Europe. Ça aboie sur l’Europe libérale et sa décadence mais ça ne mord jamais que les pauvres et les immigrés.

Durant cette décennie de chaos en Grèce, la grille de lecture antifa s’est par ailleurs imposée dans de nombreux secteurs de la société.

En Grèce, l’affrontement entre antifascistes et fascistes est une des lignes de front du combat pour construire une autre Grèce que celle soumise à la troïka. Ce combat ne se règle pas sur le Net à coup de films agiographiques ou de logorrhées déversées depuis un canapé rouge mais bien sur le pavé, et nécessite un plus d’engagement qu’une soirée d’anciens combattants dans un bar parisien.

L’autre enseignement de cette crise, c’est que pour sortir de l’étau mis en place par le FMI, la Banque centrale européenne et les libéraux qui gouvernent majoritairement en Europe, les Grecs se sont logiquement rabattus vers la seule option porteuse d’une possibilité de sortie de crise positive : la gauche radicale.

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Pour aller de l’avant, n’en déplaise à tous les fans et soutiens des nationalistes, le peuple grec n’a pas choisi une formation politique comparable à celle du premier ministre hongrois Viktor Orban. Ce dernier est à la tête d’une formation conservatrice. C’est un libéral du point de vue économique, comme la plupart des dirigeants du FN. Il multiplie les fanfaronnades de défi au Parlement européen, à l’instar des dirigeants du FN. Seulement voilà, dans les faits, il ne fait rien pour aller à l’encontre des directives économiques de Bruxelles. Le seul élément marquant de sa gouvernance est le déchainement de violence à l’encontre des minorités. Son combat contre « Bruxelles » est uniquement fondé sur la possibilité de déroger aux droits de l’Homme afin qu’une partie de la population vivant en Hongrie puisse subir des traitements injustes.
Pour le reste, rien qui soit porteur d’un espoir de changement ou d’une amélioration du point de vue économique.

Le choix du peuple grec ne s’est pas non plus tourné vers un parti comme le « Parti de la liberté » de Gert Wilders : un parti qui demande la sortie de l’Union Européenne des États les plus faibles, dont le leader a refusé de siéger au Parlement européen alors qu’il y avait été élu et qui défend une ligne politique libérale sur fond de haine farouche envers tout ce qui est assimilé à l’Islam.

Les Grecs n’ont pas non plus choisi une option qui ressemble au « Parti des Vrais Finlandais », ni à ce que présentent les anglais de « UKIP », dont les fans sont légion dans la dissidence en carton.

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Bien que la Grèce soit un pays d’entrée dans l’Europe qui voit passer ou rester sur son sol un grand nombre de migrants et la misère qui les accompagne, le peuple grec n’a pas mis au pouvoir un parti qui s’en prend aux immigrés. Les Grecs nous font ainsi la démonstration que l’immigration n’est pas le problème.

Au pied du mur, le peuple grec ne peut pas se contenter de gens qui ne proposent qu’un numéro de fort en gueule au service de leurs élites économiques et un lynchage hebdomadaire pour se défouler. Ce numéro, en réalité, c’est un luxe pour petits bourgeois paralysés par la peur du déclassement social. Dans la version française, ça donne les phobies d’un fils de notaire vautré sur son canapé rouge ou les ravalements de façade du FN pour cacher son libéralisme et son racisme. Les « europhobes » de droite ne sont rien d’autre que cela : des gens qui ont la bouche pleine et veulent continuer à s’empiffrer en carottant l’État d’à côté et les plus faibles qu’eux.

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La population grecque a fait le choix de Syriza, à l’opposé des théories bancales qui nous vendent l’extrême droite et son nationalisme comme remparts face à l’Europe libérale.
Syriza est une formation de la gauche radicale, qui peut sans doute être considérée comme « molle » parce qu’elle n’aspire pas à changer pleinement la société mais simplement à limiter les dégâts. Cependant, même a minima, par le simple fait qu’elle ne trahit pas (encore ?) ce que doit être la gauche (en défendant la justice sociale, l’internationalisme et l’égalité raciale), cette formation fait déraper la Communauté européenne et remet en question le fonctionnement non démocratique de l’Union européenne. C’est déjà 1000 fois plus que ce que tous les partis de gouvernement nationalistes qui ont eu accès aux leviers du pouvoir en Europe ont fait. Ces derniers n’ont jamais réalisé quoi que ce soit sinon aboyer et mordre les plus faibles sans jamais rien tenter pour inverser les logiques économiques qui génèrent partout misère et chaos.

Les Grecs, dans leur majorité, ont voté par nécessité pour la seule option qui représente quelque chose de digne et propose une alternative crédible à la dégradation de leurs conditions de vie. Cette option, c’est un programme de gauche basé sur l‘égalité sociale et l’internationalisme.

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La réalité est têtue. Malgré tous les discours dont on nous bassine à longueur de temps sur les médias dominants et dissidents, il n’y a pas 36 façons de sortir du pétrin économique dans lequel les banques et les industriels nous malaxent. C’est socialisme ou barbarie.
KKE
Que ce soit en Grèce, en Amérique Latine, en Palestine ou au Kurdistan, il n’y a pas d’autre solution que de se battre à la hauteur de l’oppression subie et de proposer une société alternative au modèle imposé par l’oppresseur.

5 Réponses to “A problème réel, une solution concrète : l’exemple de la Grèce”

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