La confrontation avec le réel est ce qui fait le plus mal aux droites radicales européennes. C’est pour réussir à donner une apparente cohésion à la défense de leurs privilèges et à leur posture de rebelles que le monde de l’extrême droite est fatalement peuplée de mythomanes.
Prenons « Batskin », nom de scène de Serge Ayoub qui, dans sa vraie vie de nanti, est fils de procureur. Il a une aura de guerrier pour quelques bagarres de rue que l’on raconte aux moins de 20 ans, il est le symbole de la « street credibility » de l’extrême droite.
Dans la réalité c’est un peu différent et moins glorieux. Le mythe de « Batskin le justicier blanc » vole en éclats à chaque confrontation avec une expérience concrète et radicale. Adepte de la violence et de l’action physique, Ayoub s’est dérobé à chaque coup dur. Chaque fois qu’un de ses militants se fait poisser dans une sale affaire où le racisme violent est camouflé en défense de la France, le vernis du super guerrier s’écaille et laisse apparaitre l’image d’une grosse poucave gonflée aux stéroïdes. Lors de tous les épisodes au cours desquels un de ses soldats passe de la théorie de la haine raciale à la pratique sur une personne physique, le big boss de la 3eme voix rentre son menton mussolinien et fait la pleureuse « je le connais pas, je suis un gentil garçon ».
Des assassins comme Régis Kerhuel ou Esteban Morillo ont ainsi été lâchés en quelques secondes par leur führer des pavés.
On est loin du mythe du guerrier qui tient le pavé en défiant les autorités :
Les faits sont là.
Pourtant, après plus de 30 ans de lâcheté sur le service après-vente de la haine raciale qu’il sème, le beau Serge trouve toujours des idiots pour venir mettre leur violence à son service. Ça reste un mystère.
Comment peut-on continuer à cogner pour un chef qui au moindre pépin se défausse et t’abandonne ? Pour nous, militer c’est assumer. Lui n’assume pas et devient hystérique quand on lui met la réalité des faits devant les yeux.
A l’extrême droite, militer c’est plutôt mythoner et plastronner. Dans un « monde moderne » – comme ils disent – où la superficialité compte, ça fonctionne plus que bien.
Un autre exemple, le 22 novembre dernier, la frange radicale de l’extrême droite européenne, celle qui se veut révolutionnaire, tenait un meeting a Nanterre. Là, c’est l’extrême droite paradoxale qui s’est donnée en spectacle, un moment proche de la twilight zone.
Tous les mouvements présents lors de ce meeting sont nés de la haine du communisme et de la défense des intérêts coloniaux français lors des guerres d’indépendance. Ils sont les rejetons d’une guerre froide gagnée par leur camp.
Ces mouvements politiques étaient dans le camp du monde libre, comme ils le nommaient à l’époque. Il suffit de savoir lire les tracts et les documents qu’ils produisaient eux-mêmes à cette époque.
Du Nicaragua à l’Afghanistan en passant par l’Afrique le monde d’avant était plein de « freedom fighters » financés par les USA et encadrés par les fascistes européens. Tous les anciens de la Gestapo et des milices liées au régime hitlérien ont été utilisés comme agents et conseillers pour lutter contre « L’empire du mal » représenté par l’alternative des états socialistes.
Le modèle soviétique a plutôt bien résisté à tous ces coups de l’impérialisme américain et aux manœuvres des sbires nationalistes européens. Ils n’ont pas été déterminants, mais ont été à la pointe de la répression. Ils ont accompli le sale boulot avec le zèle qui les caractérise quand ils sont en position de lynchage.
L’extrême droite européenne appartient de fait au camp des vainqueurs. Ils ont été les troupes de chocs de ce qu’on appelle aujourd’hui la « mondialisation ». Pourtant les braves soldats de l’occident triomphant du communisme et des luttes anticoloniales n’ont pas l’air contents d’être dans le camp des vainqueurs.
Ils n’ont pas tous le culot de « VOXNR » qui vante avec une fausse nostalgie une pureté ethnique inventée du camp socialiste face au métissage de l’Occident mais on les sent un peu perdus idéologiquement. Après avoir fourni en combattants les premières lignes des états bourgeois, des démocraties libérales et des multinationales contre le communisme et les peuples colonisés, les militants d’extrême droite jouent la comédie du rejet de l’état bourgeois et presque la nostalgie du marxisme.
Ils se répandent aujourd’hui sur le pouvoir néfaste des banques et des trusts qui les ont financés et armés pendant toute la guerre froide.
Ils en sont à reprendre les arguments et le vocabulaire de la gauche révolutionnaire qu’ils ont combattue et combatte encore. À une chose près, ils y rajoutent leur touche singulière, leur petit marqueur : la haine des Juifs, des Musulmans et du non blanc et leur paranoïa sur l’infiltration de l’état par des gauchistes.
Si on les écoute, la gauche radicale qui a enfanté les Révolutions Socialistes et les mouvements d’indépendance dont ils ont été les farouches ennemis contrôlent aussi les États qui ont financé leur combat en première ligne pour la « Civilisation ».
C’est le complot parfait, leurs ennemis tiennent tout et eux sont des gentils naïfs qui cognent pour rendre service sans trop savoir pourquoi.
Si la gauche révolutionnaire tenait les démocraties libérales et le camp soviétique pourquoi ce n’est pas le camp socialiste qui a gagné la guerre froide ? Le retour au réel est violent pour ces paranos mythomanes.
Ce ne sont pas les nôtres qui bossaient pour les services de sécurité des états bourgeois dans la lutte contre le communisme et les guerres d’indépendance. Il est compliqué d’honorer les martyrs italiens de l’époque du « Gladio » et de de se rêver en dissidence face à l’impérialisme américain quand on a finalement été son larbin.
Il faut miser sur l’inculture des gens, l’envie de rêver pour parler de lutter contre l’Empire aux côtés de Gabriele Adinolfi. Parler des manigances américaines aux côtés d’un type dont les actions politiques étaient bénéfiques à la CIA avec comme clou du spectacle une implication dans l’attentat de la Gare de Bologne c’est de la mauvaise foi et du mépris pour l’auditoire. Comme toujours, ils dénoncent des machinations imaginaires et se retrouvent à faire oublier qu’ils ont été volontairement ou non (et c’est pire, parce ce que cela confine à la bêtise) des pions au service des puissances impérialistes les plus voraces.
Ce ne sont pas les nôtres qui bossent aujourd’hui encore pour les services secrets, les forces armées, les juges et les flics des états bourgeois occidentaux. Ce sont les militants d’extrême droite.
On trouve aisément des militants du Front National dans les rangs de la Police Nationale et de l’armée et de la Justice, bien plus sûrement que des gauchistes ou des militant.e.s se battant pour la justice économique et sociale.
Toutes ces chapelles d’extrême droite ont leur spécificité, chacune peut différer sur la nature de l’ennemi primaire ou secondaire (Juifs ou Musulmans), ces mouvements peuvent varier sur leur sérieux et leur violence : mais ils sont tous obligés de déformer la réalité pour cacher la contradiction entre leurs actes et la manière dont ils se présentent. Une vie de mythomane à se raconter des histoires de viking pour se cacher qu’on est rien d’autre qu’un supplétif du pouvoir de l’argent.
La palme du bateleur revient évidement a Soral et à « Égalite et réconciliation ». Un menteur comme lui peut ainsi s’inventer une vie au PCF dans les années 90 alors qu’il n’y a jamais été. À l’époque, selon ses propres dires, c’était un mondain déjanté, un drogué obsédé sexuel qui couchait aussi avec des animaux.
Un individu aux antipodes de la vie austère des cellules d’un PCF en déclin. Pour ceux qui ont connu le PCF dans les années 90 qui peut imaginer qu’un décadent comme Soral puisse y avoir tenu un rôle militant de premier ou dernier plan?
Le portrait de Soral en « fils de pub des années 80-90 » ce n’est pas nous qui l’inventons c’est lui même qui se décrit comme cela dans ses livres. Mais ça, c’était avant que le fils de notaire soit mis en orbite par le Font National pour semer la confusion dans nos quartiers populaires. Depuis, il s’est inventé une autre vie.
On entend Alain Soral financé par les réseaux du FN depuis au moins 2005 disserter sur « le marxisme ». Pour être franc, ça fait le même effet que lorsque Florian Philippot se permet de citer Syriza et Podemos en exemple politique.
Leur hypocrisie est sans limite. Ils siphonnent tout le vocabulaire et les références de la gauche et des mouvements révolutionnaires mais dans le même temps ils la délégitiment a coup de mensonges l’accusant d’être un rouage de l’état bourgeois. On atteint le sommet de l’hypocrisie quand Alain vautré sur son canapé rouge et habillé en flic ou en militaire nous explique que la gauche révolutionnaire bosse pour l’État bourgeois et le capital.
Ce travail de diversion empêche l’organisation des populations vivant sur un même territoire en les divisant et hiérarchisant.
Il faudra nous expliquer un jour comment on peut rendre hommage aux flics et à l’armée, chiens de garde par excellence de l’état bourgeois, et se prétendre être un dissident ? D’ailleurs lorsque que ses disciples vont un peu trop loin dans la récupération de la contestation populaire, il fait rentrer tout ça dans le rang.
Contester sans rien remettre en cause, lutter pour conserver un système injuste et se donner une image révolutionnaire courageuse c’est ce qui les pousse, tous autant qu’ils sont, à la mythomanie.
A chaque fois le retour au réel est compliqué alors ça affabule, ça raconte des histoires comme celle d’E&R et de son soutien de la révolution bolivarienne par exemple. Alain Soral se réclame de Chavez, mais voilà, pas de chance, la révolution bolivarienne du vivant de Chavez et jusqu’à encore aujourd’hui le met tricards lui et ses potes alors que par contre elle reçoit Mélenchon ou Besancenot avec les honneurs dus à la fraternité d’arme de ceux qui combattent dans le même camp.
Comment vendre ça aux militants d’ER ? On travestit le réel comme d’habitude.
À voir la façon dont les idées de la gauche radicale sont plagiées par l’extrême droite, il serait presque possible de sourire de mépris en direction des nationalistes qui prétendent donner des leçons intellectuelles.
Il n’y a rien à reprendre dans leur camp : leur paranos sur les Juifs qui dominent le monde, leur fantasme sur le grand remplacement par les Musulmans et autres métissages forcés, ou toutes leurs idées farfelues sur les illuminatis ou les Francs-Maçons ne sont d’aucune utilité pour comprendre et changer le monde. On leur laisse tous leurs mensonges.
Ils sont irresponsables et n’assument jamais leurs actes.
La désignation d’un bouc émissaire peut suffire à distraire une partie de la population quand la situation sociale est chaude. La température monte, c’est une question de temps avant que la crise économique n’implique une remise en question radicale du fonctionnement de notre société.
En attendant ce moment, les militants nationalistes français et leurs supplétifs se placent en première ligne pour défendre les classes dominantes et leurs privilèges économiques au nom de supériorité raciale et culturelle.
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